Rencontre avec le vigneron: Jean Marc de Crozals, Domaine des Homs, Minervois

Bonjour Jean Marc, d’où viens tu ? Du Languedoc. J’ai fait des études viticoles et œnologiques où j’ai rencontré Anne, qui deviendra plus tard mon épouse. Puis après une expérience professionnelle dans le monde agro-alimentaire, je suis revenu sur le domaine familial. Voilà chassez le naturel, il revient au galop.
 

Qu’est ce que tu aimes j’aime la nature, la pêche, la cueillette des champignons, la marche dans les paysages sauvages où l’on s’imprègne de la faune et de la flore.

Qu’est ce que tu n’aimes pas ?
L’hypocrisie en générale.

Quand as tu décidé de revenir sur le domaine familial ? Est ce que cela a été facile? 

Je suis revenu au pays en 2000, après un détour dans la vallée du Rhône.
Pas facile de démarrer tant l’image est négative !!
Un vignoble vieillissant, très peu renouvelé avec beaucoup de manquants, pas d’espalier, pas de cépage blanc : j’avais un vrai challenge à relever.
Nous avons commencé par un arrachage progressif hectare après hectare et une replantation avec des cépages essentiellement méditerranéens qui sont adaptés à nos climats : Grenache, Cinsault, Syrah, Viognier, Muscat et bientôt Vermentino et Grenache Gris.
Nous avons gardé les vieux grenaches et syrahs qui étaient les plus qualitatifs.
Chaque cépage a été implanté en fonction du Terroir et du sol.

JEAN MARC, SES VINS, SON TRAVAIL

Quel est le millésime que tu as aimé vinifier ?

2012 : un millésime équilibré, reflet d’un vignoble qui lui aussi a trouvé son équilibre. Si le sol est vivant alors tout devient plus facile à la vinification 

Pourquoi as tu décidé de faire des vins biologiques ? Est ce que le climat du Minervois rend la viticulture biologique compliquée? 

En revenant au domaine, je savais que je voulais faire des vins biologiques, nous avons démarré notre travail avec le minimum de produits de synthèse puis aucun et à la naissance de notre fils Paul en 2006, nous avons demandé la certification. Depuis 2009, tous nos vins et autres productions du domaine sont bio : olives, huiles d’olive et amandes.

Le climat est favorable à la culture biologique chez nous car la région est chaude, sèche et ventée. Nous ne connaissons presque pas les maladies fongiques.
Par contre, à l’inverse nous pouvons souffrir du manque d’eau. Les pluies d’automne et d’hiver ne suffisent pas toujours.
Depuis le millésime 2015, nous avons subit plusieurs sécheresse. Et je n’ai aucun regret d’avoir fait le choix d’un travail régulier des sols. L’enherbement serait impossible chez moi, il ne pleut pas assez pour faire lever les semis et puis je ne pourrais pas passer le gyrobroyeur tant les sols sont pierreux.
Je pense que nous devons adapter nos cultures à nos sols et régions et chaque vigneron fait au mieux en prenant tous les éléments naturels en compte.
Les vins depuis 2015 continuent à gagner en finesse et me font dire que je ne me suis pas trompé.

Par contre, je fais aussi des semis lorsque les sols des parcelles le permet. Nous venons de semer 1 ha de luzerne la semaine dernière. C’est une légumineuse parfaite pour enrichir le sol en azote et préparer des futures parcelles. Ce sont des semis faits pour les 5 à 6 années à venir.
C’est aussi un excellent moyen de continuer à développer la biodiversité au domaine.

SES VIGNES, SON DOMAINE

Qu’est ce que tu aimes dans la région du Minervois ? 

Nous avons la chance en Languedoc d’avoir une vraie diversité des terroirs, c’est vrai à l’échelle de chaque appellation. Dans le Minervois, nous avons les terroirs de la Montagne Noire, de schistes, des balcons de l’Aude, etc. Au domaine, nos vignes sont plantées sur le Terroir des terrasses de l’Argent Double, du nom de la rivière qui s’écoule ici.
J’aime aussi pouvoir vinifier autant de cépages variés et de travailler les assemblages.

Comment as tu choisi les cépages que tu as replantés ? 

C’est principalenet en me reposant sur la nature des sols. 
Revenant de la vallée du Rhone, j’avais envie de travailler avec de la Syrah et du Viognier mais j’ai voulu m’assurer qu’ils s’implanteraient bien chez moi aux Homs, aussi nous avons fait faire des analyses avant de faire nos choix.
J’ai choisi un clone très qualitatif pour la Syrah, produisant des petites grappes et des petites baies pour produire des vins de qualité et équilibrés.

J’aime aussi beaucoup le Viognier, je trouve que c’est un cépage qui nous le rend bien. Il n’est pas facile à travailler, il produit beaucoup de pampres (il faut l’épamprer 2 à 3 fois par ans), il faut l’ébourgeonner, le relever … Mais, c’est un cépage qui ne triche pas, si les rendements dépassent les 40 Hl/ha, alors c’est dilué et pas bon. Au contraire, lorsque le travail est bien fait, les vins sont d’une grande complexité, il y a un très bon grain et je suis très content d’en avoir aux Homs.

Y a t-il des terroirs différents sur ton domaine ?

Oui, on peut en compter 3 :
Une partie des terres sont profondes avec peu de cailloux, elles ont un potentiel de retention d’eau intéressant, surtout ces dernières années avec les épisodes de sécheresse. C’est là que sont plantés nos blancs : Chardonnay et Viognier.
Nous avons aussi quelques terres très pauvres, des sols de garrigues. Là on retrouve les Cinsault et Grenache. Sur ces sols, les cinsaults produisent peu, c’est important de pouvoir freiner son rendement. En Languedoc, c’est notre Pinot, un cépage qui donne peu de sucre et sans structure tannique.
Les grenaches, cépage d’origine espagnole, aiment ces sols.
Enfin, le dernier et aussi, le plus représentatif est celui de la Gravière où nous avons nos Syrah et Grenache. Ce sont les terres du Minervois, très riches en pierres, les terrasses de l’Argent Double.

SES VINS MAINTENANT ET DEMAIN

Comment travailles tu tes vins ? 

La vinification est traditionnelle en cuve béton avec aucun intrant ni SO2 pendant la vinification. Je pars du principe que si la vigne est équilibrée et le raisin sain, le travail en cave sera plus facile avec juste un contrôle des températures, quelques remontages et délestages en début de fermentation.
Je me concentre aujourd’hui sur l’élevage en barrique des blancs et les vinifications intégrales en barriques pour les rouges : peut-être une nouvelle cuvée à venir !

Presque toute ta gamme de vin rouge est en appellation Minervois depuis quand ?

Depuis 2015 qui a été un très beau millésime avec de l’équilibre.
Au départ, lorsque j’ai repris le domaine familial, j’ai déclassé une partie de mes vins rouges en IGP. J’ai un grand respect pour les appellations et je voulais atteindre une certaine qualité avant de mettre mes vins en bouteille en AOC Minervois.
Tous les efforts faits dans le vignoble ont commencé à payer à partir de 2012. Nos vins ont gagné en structure, matière, richesse tout en conservant un équilibre.
En 2015, notre cuvée Clots de Pals est venue rejoindre Paul et la Gravière et nous avons aujourd’hui une gamme de 3 Minervois rouge avec plus ou moins de Grenache ou Syrah.

Pourquoi vinifies-tu tous tes blancs en partie en barrique ?

J’ai utilisé la barrique en vinification depuis le début de notre production en blanc, en 2005 sur le viognier et maintenant aussi le chardonnay.
La fermentation en barrique puis l’élevage sur lie leur apporte de la complexité et du gras.
J’avais déjà la fraicheur grâce au travail du sol, mais je voulais gagner en texture. 

 

Tu produis « les petites bulles » un vin doux pétillant très léger, vinifié comme un Moscato d’Asti, d’où t’est venue l’idée ?

Du Moscato d’Asti ! C’est un vin que j’aime beaucoup, pour l’apéritif, avec les desserts … C’est un vin léger et frais que j’ai toujours aimé déguster et donc j’avais envie d’en produire.
C’est aussi l’histoire d’une rencontre, le hasard m’a fait connaitre un professionnel dans le Sud de la France qui permet de vinifier en cuve close des moûts de raisin. Le travail est très sérieux et j’ai eu confiance.
Avant de me lancer, j’ai fait venir plusieurs Moscato d’Asti, j’en ai dégusté beaucoup … 42 … pour comprendre, voir ce que j’aimais ou ce que j’aimais moins. Nous avons fait analyser ceux que nous avions le plus aimés ; comme dans tous mes vins, l’équilibre reste important pour moi, alors nous avons travaillé avec des moûts moins riches en sucre pour garder un vin frais.
Notre cuvée Petites Bulles contient 70 g/L de sucre (cela peut monter jusqu’à 110 120 g/L pour les Moscato d’Asti en général). Nous utilisons notre muscat petits grains qui auparavant servait à élaborer notre jus de raisin. 


 Qu’est ce que tu attends d’un vin ?

Pour moi, le vin rime avec partage et convivialité. J’aime les vins plaisirs à boire jeunes.
Et c’est pour ça que l’Amandier a été produite, pour faire des vins simples … de plaisir.

Quels sont les plats régionaux que tu conseilles avec tes vins ?

Nous avons plusieurs plats très typiques, comme le cassoulet, le magret de canard. Ces plats s’accordent parfaitement avec la cuvée Paul ou Gravière. A la belle saison, nous cuisinons beaucoup à la  plancha des viandes et des poissons grillés, des salades. Alors l’Amandier ou le Clots de Pals seront plus adaptés.

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