Rencontre avec le vigneron: Giulio Armani, Denavolo, Colli Piacentini

Bonjour Giulio, d’où viens tu? 

Je suis natif de la région, je suis né à 7 km de la Stoppa. Mes parents sont nés tout près de Denavolo et je suis content d’être resté dans ma région natale.

Qu’est ce que tu aimes dans la vie ?

J’aime faire du vin ! Vraiment, c’est ma passion.
J’aime aussi lire, surtout des livres historiques. J’aime comprendre et souvent on trouve les clés en se plongeant dans l’Histoire. 
J’aime aussi la cuisine, j’ai un vrai plaisir à manger au restaurant, échanger avec les chefs. J’ai la chance de produire des vins qui se marient avec des plats très différents et j’aime goûter les associations culinaires qu’ils créent. Evidemment, en ce moment, je ne peux plus aller au restaurant et je suis triste pour nos amis restaurateurs et sommeliers, énervé aussi par la situation.

Qu’est ce que tu n’aimes pas dans la vie ?

Je n’aime pas le bazar, le bruit … la « confusione » en Italien.

GIULIO, SON TRAVAIL, SES VINS

Quand as tu décidé de créer ton propre domaine ?

En fait, je voulais surtout m’acheter une maison, je cherchais une ancienne maison en pierre dans la région et j’ai trouvé celle où j’habite aujourd’hui. Il y avait plusieurs bâtiments à rénover. Il y avait du terrain autour, 30 ha et le prix était intéressant.
Je me voyais jardiner, mais jardiner de la vigne, avoir quelques pieds pour faire mon vin pour ma consommation personnelle et partager avec des amis. J’aurais vendu un peu de raisin en complément.
Alors j’ai planté 1 ha à Cassinera. Et j’y ai pris goût :-), je « jardine » aujourd’hui 8 ha !

Qu’est ce que tu aimes dans cette région de collines au Sud de
Piacenza ?

J’aime cette région, car c’est ma région natale, je m’y sens bien. Ce sont mes racines. Je fais du vin depuis 40 ans (cette année sera ma 40ème vinification) à la Stoppa.
Je me voyais m’installer dans la région où étaient nés mes parents. Quand l’occasion s’est présentée, je ne l’ai pas laissé passer.

Quel est le millésime que tu as aimé vinifier ?

J’ai aimé vinifier les 40 derniers millésimes 🙂 Soient tous ceux que j’ai produit à la Stoppa ou à Denavolo. Chacun a son histoire, ses caractéristiques. Notre travail c’est de comprendre là où nous travaillons, là où sont plantées nos vignes et de produire un vin qui exprime ce Terroir. 

GIULIO, SES VIGNES, SES PARCELLES

Pourquoi n’as tu planté que des raisins blancs ?

Ce sont pour moi, les raisins les mieux adaptés à ce Terroir : cette altitude, ce sol calcaire et ces pentes. Avant de m’installer, j’avais goûté les vins produits dans la région, certains voisins, juste à coté, produisent des vins rouges aussi, mais je les ai toujours moins aimés aux blancs.

Peux tu nous rappeler l’encépagement de ton domaine ?

Je travaille avec des cépages typiques de la région.
Il y a des cépages que l’on ne trouve que dans cette petite région des Colli Piacentini comme la Malvasia di Candia Aromatica, un cépage avec une pellicule épaisse, très tannique et très aromatique et l’Ortrugo, un cépage peu aromatique qui apporte à l’assemblage de  la fraîcheur par son acidité. 

J’ai aussi planté du Trebbiano toujours pour cette acidité que j’aime dans les vins.
Nous avons aussi historiquement de la Marsanne. Les vieilles vignes plantées en 1975 ont d’ailleurs 25% de l’encépagement en Marsanne, aussi, assez naturellement, j’en ai replanté sur les jeunes vignes ; ce cépage est intéressant pour le gras et la rondeur qu’il apporte à mes vins.

J’ai planté du Sauvignon Blanc, acheté en France. J’aime beaucoup ce cépage, aromatique. Il donne de très bons résultats avec le climat frais de Denavolo et les sols calcaires.

Et enfin, j’ai quelques pieds de Santa Maria qui font aussi partie des cépages locaux que l’on doit avoir dans la région lorsque l’on fait de nouvelles plantations; Mais la production est très faible, sur 1000 pieds, je ne produits que 550 Kg.

LES VINS DE GIULIO

Adaptes-tu les vinifications en fonction des vins de ta gamme ? 

Les vins du domaine sont presque tous vinifiés de la même manière. Je travaille avec les raisins blancs éraflés et foulés. Les premiers jours lorsque la fermentation alcoolique est bien active, je fais des remontages en aérant bien le vin. Ensuite après 5, 6 jours, je laisse les fermentations se faire sans apporter d’oxygène.
Je conserve le chapeau, le marc très longtemps. Je ne veux pas soutirer les vins avant l’hiver, pour que les vins bénéficient de l’élevage sur lie le plus longtemps possible, alors je le fais souvent à partir de mars ou avril parfois plus tard pour Dinavolo.
C’est la dégustation qui me fait décider du bon moment.

Seule une partie des raisins entrant dans la composition de Catavela est pressée. Ce sont des raisins plantés dans une zone plus fraîche sur un bas de côteau et les maturités sont difficiles à atteindre, aussi, pour cette fraction, je fais un pressurage direct.

Aimerais tu vinifier un vin pétillant ?

Oui j’aimerais bien faire un vin pétillant. Nous avons la chance d’avoir dans notre région de la Barbera, c’est un cépage rouge très peu tannique et avec beaucoup d’acidité. J’aimerais faire un blanc pétillant de Barbera.
Je pense que ça donnerait de très belles choses, et c’est un essai que je ferai prochainement, en méthode traditionnelle avec prise de mousse en bouteille.

Quand as tu produit pour la première fois un vin blanc avec l’ensemble du raisin : pulpe et pellicule ?

En 2001, à la Stoppa, pour produire ce qui est devenu l’Ageno. C’était alors un essai. Je goûtais beaucoup de vins blancs, vinifiés en moût ou d’autres vinifiés avec les pellicules. J’aimais beaucoup les vins de mon ami Stanco (Radikon) qui nous a malheureusement quittés récemment.
Alors j’ai voulu essayer pour voir et Elena (Pantaleoni) était d’accord pour cet essai. Nous avons vendangé les derniers raisins blancs de Malvasia, d’ortrugo et de Trebbiano et nous avons essayé. Le résultat nous a beaucoup plu et aujourd’hui Ageno est compris.

Lorsque je me suis installé et que j’ai commencé à faire les vins à Denavolo, il était évident pour moi que je ferai la même chose. Mon père vinifiait ainsi, il achetait 700 à 800 kg de raisins tous les ans pour faire son vin. Mon grand-père avant lui aussi, il avait un peu de terre et vendait surtout les raisins mais ceux qu’il gardait pour sa consommation étaient vinifiés comme ça.

C’était le mode de vinification courant en Italie. Le Terroir c’est aussi perpétuer des traditions.

Quels sont les vins que tu aimes boire et qu’est ce que tu aimes dans un vin ? 

J’aime beaucoup les vins rouges Français du Sud de la France (Languedoc, Rhone) qui ont un peu de bouteille.

Je pense qu’un vin bien fait est un vin qui se conserve bien, dans ce cas, la patience, lui permettra toujours de se bonifier car avec le temps, il évoluera en bouteille et gagnera en complexité. Malheureusement ce n’est pas toujours facile de garder ses vins.

Tu es vigneron artisan, cultives-tu autre chose que la vigne ? 

Oui, j’ai un peu de blé tendre. Nous avons environ 6 ha cultivés et aujourd’hui nous produisons la farine et des pâtes.
Le blé est une variété ancienne qui s’appelle « Ardito e Virgilo », qui donne un blé de belle qualité avec des petits rendements et que nous pouvons re-semer tous les ans avec nos propres graines.  
Nous faisons transformer une partie en pâtes chez un artisan de la région et nous vendons au domaine un peu de farine et des pâtes issues de ces blés.

Quelles sont les spécialités de la région qui se marient bien avec tes vins? 
En antipasti, les frittata avec des oeufs et des légumes et bien sûr de la charcuterie. Nous en avons beaucoup par ici et l’acidité et la légèreté des vins se marient bien avec.
Avec Dinavolino, les asperges vertes avec des pâtes ou en risotto, les tortelli con la ricotta e le verdure ou burro e salvia (beurre de sauge).
Les poissons de rivière ou l’anguille.
Avec Dinavolo, les fromages locaux, des tomes de vache peu affinées d’un à deux mois.

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